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06/ mars
2024

Actualités juridiques

Droit international et européen — Compliance

TRUSTS : les changements issus de la Loi n° 1.559 du 29 février 2024 (Partie IV)

En réponse aux recommandations du Comité MONEYVAL (Rapport adopté en octobre 2022), la Loi n° 1.559 du 29 février 2024 (Partie IV) a modifié la Loi n° 214 du 27 février 1936 portant révision de la loi n° 207 du 12 juillet 1935 sur les trusts, et l'Ordonnance Souveraine n° 10.430 du 29 février 2024 a modifié l'Ordonnance Souveraine n° 8.635 du 29 avril 2021 portant application de la loi n° 214 (JDM n° 8684 du 1er mars 2024).

Les modifications portent notamment sur les informations sur les bénéficiaires effectifs, les informations élémentaires, l'accès des autorités compétentes aux informations et aux pièces, les obligations comptables, l'inscription au Registre des trusts, la supervision de la Direction du Développement Économique et les sanctions.

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EN DETAIL

Actualisation du nom de la Cour suprême de judicature (Senior Courts of England and Wales) et conditions d'applications définies par ordonnance souveraine (art. 2 L. 214).

— Ajout de la notion de "domicile" du trustee (préférée à celle de résidence utilisée par l’article 31 de la Directive (UE) 2015/849 anti-blanchiment, modifiée par la directive (UE) 2018/843, le Code DIP faisant référence au domicile) (art. 3 L. 214).

Bénéficiaires effectifs

Obligation du trustee, et du représentant local si le trust est établi ou domicilié à l’étranger, d’obtenir, de conserver et de tenir à jour en permanence les informations adéquates, exactes et actuelles, et les pièces justificatives correspondantes sur les bénéficiaires effectifs des trusts constitués ou transférées à Monaco pour des considérations de contrôle à Monaco du respect des obligations prescrites par la loi n° 214 (les obligations qui pèsent sur le représentant local n’excluent pas celles du trustee, juridiquement responsable des obligations mises à leur charge). (art. 6-1 L. 214).

En application de l'article 6-1 de la loi n° 214, le trustee et s'il est établi ou domicilié à l'étranger, son représentant local, obtiennent, conservent et tiennent à jour en permanence les informations suivantes (art. 2 OS n° 8.635) :

  1. En ce qui concerne les constituants, les trustee, les bénéficiaires et le cas échéant, les protecteurs :

    a) les nom, nom d'usage, surnom ou pseudonyme, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité(s), adresse personnelle de la ou des personnes physiques ; b) la dénomination sociale, forme juridique, adresse du siège social, numéro et lieu d'immatriculation dans un registre public de la ou des personnes morales. Lorsque le ou les bénéficiaires n'ont pas encore été désignés, il faut entendre par bénéficiaires le groupe de personnes dans l'intérêt principal duquel le trust a été constitué ou produit ses effets.

  2. En ce qui concerne toute autre personne physique qui exerce en dernier lieu un contrôle effectif sur le trust, les nom, nom d'usage, surnom ou pseudonyme, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité(s) et adresse personnelle.
  • Durée de conservation de 10 ans (durée alignée sur la durée de la prescription de l’action publique en matière de blanchiment et de financement du terrorisme) après la date de la cessation de leur implication en qualité de trustee ou de représentant local du trust, dans un lieu situé à Monaco communiqué à la Direction du Développement Économique ;
  • Obligation des constituants, protecteurs, bénéficiaires et toute autre personne physique qui exerce en dernier lieu un contrôle effectif sur le trust de communiquer au trustee les informations, leur modification et les pièces justificatives y afférentes dans un délai de 15 jours à compter de la demande ou de la modification.
  • Obligation des trustees établis ou domiciliés à l'étranger de communiquer au représentant local désigné lesdites informations et leurs modifications ultérieures, ainsi que les pièces justificatives y afférentes, dans un délai de 15 jours à compter de la demande ou de la modification.

Obligation des représentants locaux des trustees établis ou domiciliés à l’étranger, de déclarer leur statut et fournir, en temps utile, aux organismes et personnes visés aux articles 1er et 2 de la Loi n° 1.362 les informations sur les bénéficiaires effectifs lorsque, ès qualités, pour le compte d'un trust ou de constructions juridiques similaires, ils établissent une relation d'affaires ou réalisent, à titre occasionnel, une transaction au sens de l’article 4 de la Loi n° 1.362 (art. 6-2 L. 214).

Informations élémentaires

Obligation pour le trustee, et le représentant local du trustee établi ou domicilié à l’étranger, d’obtenir, de conserver et de tenir à jour en permanence les informations portant sur les personnes et les organismes visés aux articles premier et 2 de la loi n° 1.362 du 3 août 2009, modifiée, et les personnes et les organismes de droit étranger qui, si elles étaient établies ou domiciliées sur le territoire de la Principauté, seraient considérées comme relevant de ces dispositions, qui fournissent des prestations de services ou qui entrent en relation d'affaires ou réalisent, à titre occasionnel, une transaction (au sens de l’article 4 de la Loi n° 1.362) avec le trust constitué ou transféré à Monaco, pour fournir des services ou conseils (nouvel art. 6-1-1 I- L. 214).

Le trustee, et s'il est établi ou domicilié à l'étranger son représentant local, sont tenus d'obtenir et de conserver les informations adéquates, exactes et actuelles relatives auxdites informations élémentaires ainsi que les pièces justificatives correspondantes, pendant toute la durée des prestations de services ou de conseils.

Les informations élémentaires devant être obtenues, conservées et tenues à jour en permanence par le trustee et s'il est établi ou domicilié à l'étranger, son représentant local, sur les personnes et les organismes visés à l'article 6-1-1 de la Loi n° 214, sont les suivantes (art. 2-1 OS n° 8.635) :

  1. les nom, prénoms, nationalité(s), pays de résidence, adresse professionnelle et le cas échéant, le numéro et lieu d'immatriculation dans un registre public, dans le cas d'une personne physique ;
  2. la dénomination sociale ou raison sociale, et le cas échéant, les sigles utilisés ainsi que le nom commercial ou l'enseigne utilisé, adresse du siège social, numéro et lieu d'immatriculation dans un registre public, dans le cas d'une personne morale.
  • Durée de conservation de 10 ans après la date de la cessation de leur implication dans le trust, incombant aux trustees et aux représentants locaux des trustees établis ou domicilié à l’étranger, dans un lieu situé à Monaco communiqué à la Direction du Développement Économique.

Obligation des personnes et les organismes visés aux articles premier et 2 de la Loi n° 1.362, et les personnes et les organismes de droit étranger qui, si elles étaient établies ou domiciliées sur le territoire de la Principauté, seraient considérées comme relevant de ces dispositions, visés au premier alinéa du paragraphe I, de communiquer toutes les informations nécessaires au trustee, et s'il est établi ou domicilié à l'étranger à son représentant local, ainsi que toute modification ultérieure de ces informations ainsi que les pièces justificatives y afférentes, pour qu'ils satisfassent aux exigences prévues audit paragraphe dans un délai de 30 jours. (nouvel art. 6-1-1 II- L. 214).

Accès des autorités aux informations et pièces

Pouvoir des autorités (agents habilités de la Direction du Développement Économique ainsi que celles qui ont accès aux informations du registre des trusts, dont les autorités de poursuite pénale) d’obtenir directement auprès du trustee, du représentant local du trustee établi ou domicilié à l'étranger toutes les informations qu’ils détiennent sur le trust ainsi que les pièces justificatives correspondantes. Lesdites autorités peuvent également obtenir les informations et les pièces nécessaires directement auprès des personnes occupant une fonction équivalente au trustee dans une construction juridique similaire au trust devant être inscrite au registre (nouvel art. 6-3 L. 214).

  • Les informations et pièces fournies ou rendues accessibles en application de cette disposition peuvent être communiquées à des autorités étrangères dans les conditions prévues à l'article 51‑1 et au Chapitre VIII de la Loi n° 1.362, ou par la voie de l'entraide judiciaire internationale.

Obligations comptables

Obligation du trustee, et du représentant local lorsque le trustee est établi ou domicilié à l’étranger, de conserver les documents afférents à la comptabilité ainsi que toutes les pièces justificatives correspondantes (art. 10 L. 214).

En application de l'article 10 de la Loi n° 214, les trusts sont tenus d'établir annuellement un bilan, faisant apparaître les fonds de dotation, ainsi qu'un compte des pertes et profits, au sens de l'Ordonnance Souveraine n° 3.167 du 29 janvier 1946, modifiée, et le cas échéant l'évaluation du portefeuille de valeurs mobilières détenues. Ces bilan et compte de pertes et profits doivent être remis dans les trois mois de la clôture de l'exercice à la Direction du Développement Économique. S'agissant des pièces justificatives correspondant aux documents comptables susvisés, doivent être conservés les relevés de comptes de gestion, les factures, les documents bancaires ainsi que toutes les pièces justificatives des comptes et de l'activité.

  • Durée de conservation de 10 ans après la date de la cessation de leur implication en qualité de trustee ou de représentant local du trust, dans un lieu situé à Monaco communiqué à la Direction du Développement Économique.

Registre des trusts

Les informations relatives au trust doivent être communiquées à la Direction du Développement Économique (en lieu et place du Ministre d’État) aux fins d'inscription et de conservation au Registre des trusts (art. 11 L. 214). L'inscription au registre des trusts doit être réalisée auprès de la Direction du Développement Économique dans le délai d'1 mois à compter de la constitution ou de transfert du trust dans la Principauté (art. 2-2 OS n° 8.635).

La demande d'inscription au registre est adressée à la Direction du Développement Économique par écrit (art. 12), La forme que doit revêtir la demande, son mode de transmission , ainsi que la liste des informations et des pièces justificatives qui doivent y être jointes sont déterminés par ordonnance souveraine (art. 2-3 et 2-4 OS n° 8.635). La demande d'inscription dûment complétée doit notamment être accompagnée des pièces justificatives propres à établir l'exactitude des informations qui y sont portées

Les déclarations complémentaires ou rectificatives doivent être de même communiquées à la Direction du Développement Économique. S'il est constaté des inexactitudes ou des difficultés, celle-ci enjoint au trustee de régulariser sa situation (dans les conditions prévues au nouvel art. 13-1-5) (art. 13 L. 214 ).

Obligation des organismes et des personnes visés aux articles premier et 2 de la loi n° 1.362 qui présentent une demande d’extrait des inscriptions portées au registre des trusts de signaler toute divergence à la Direction du Développement Économique dans un délai de 30 jours suivant la date d’obtention dudit extrait (art. 13-1 L. 214).

Redéfinition des conditions dans lesquelles les autorités compétentes ont accès aux informations du registre des trusts, sur le modèle des règles applicables pour le « registre des bénéficiaires effectifs - sociétés et GIE - » (art. 13-3 L. 214).

  • Les informations du registre des trusts peuvent être communiquées à des autorités étrangères dans les conditions prévues à l'article 51‑1 et au Chapitre VIII de la Loi n° 1.362, ou par la voie de l'entraide judiciaire internationale.

La consultation du registre des trusts, en conformité avec les dispositions de l’article 13-3 susvisé, permet la mise en œuvre de procédures ou la prise de décisions, concernant des infractions ou des manquements à des dispositions légales autres que celles prévues à la présente loi et que ladite consultation aurait permis de révéler. (art. 13-8 L. 214).

Accès des trustees, des représentants locaux des trustees aux seules informations du registre des trusts qu'ils ont déclarées (art. 13-4 L. 214) dans les conditions prévues par ordonnance souveraine (art. 7 OS n° 8.635).

Supervision des personnes tenues à l’inscription au registre des trusts

Il est attribué à la Direction du Développement Économique la supervision et le contrôle du respect par les trustees, les représentants locaux des trustees établis ou domiciliés à l’étranger, de leurs obligations et des mesures prises pour leur application (nouvel art. 13-1-1 L. 214).

Modalités des contrôles sur pièces et sur place réalisés par les agents habilités de la Direction du Développement Économique ; plages horaires (entre 9-18 heures ou, en dehors de ces heures, lorsque l'accès au public est autorisé ou lorsqu'une activité professionnelle est en cours) pendant lesquelles le contrôle sur place peut être effectué (nouveaux art. 13-1-2 et 13-1-3 L. 214 ). À l'issue d'un contrôle, les agents habilités de la Direction du Développement Économique qui y ont participé, rédigent, au terme d'échanges contradictoires, un rapport dans les conditions prévues par ordonnance souveraine (art. 12 OS n° 8.635).

Le Directeur du Développement Économique peut communiquer aux autorités ayant accès au Registre, toutes informations ou documents en lien avec la loi qu’il juge utiles à l’exercice de leurs missions respectives (nouvel art. 13-1-4 L. 214).

Sanctions

Introduction d'une procédure de sanctions administratives pécuniaires inspirée de celle qui vise à sanctionner les manquements aux obligations d’inscription au registre des bénéficiaires effectifs, au répertoire du commerce et de l’industrie et au registre spécial des sociétés civiles (nouveaux art. 13-1-5 et 13-1-6 L. 214), avec des sanctions administratives et pénales proportionnées et dissuasives (articles 14 à 22 L. 214).

  • La procédure de sanction administrative pécuniaire repose, dans un premier temps, sur un mécanisme de sanction pécuniaire d’un montant pouvant atteindre 10.000 euros, après mise en demeure de la personne concernée, cette dernière ayant la possibilité de régulariser sa situation dans le délai imparti.
  • Si, malgré le prononcé de la première sanction, le ou les manquements constatés persistent, une seconde sanction administrative pécuniaire pouvant atteindre 200.000 euros est encourue.
  • Lorsque le manquement persiste, malgré le prononcé de cette seconde amende, la personne concernée s’expose à des poursuites pénales.
  • Sont également passibles de sanctions administratives du fait de leur implication personnelle quant aux manquements constatés, les dirigeants, associés, actionnaires du trustee.

Recours de plein contentieux contre les sanctions prononcées par le Directeur du Développement Economique ouvert devant le Tribunal de première instance dans le délai de 2 mois suivant la date de leur notification (nouvel art. 13-1-7 L. 214).

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