>
fr / en
Cabinet Avocats en Principauté de Monaco Cabinet Avocats en Principauté de Monaco

17

mai
2024

Articles

Droit civil

Droit des nouvelles technologies et de la communication

17/ mai
2024

Articles

Droit civil — Droit des nouvelles technologies et de la communication

La valeur juridique de la signature scannée ou numérisée

Présentation

Aux termes de l’article 1163-1, alinéa 1 du Code civil, la signature a pour fonctions d’identifier son auteur et de manifester son consentement aux obligations qui découlent d’un acte juridique.

La signature dite scannée ou numérisée est l’image numérique d’une signature manuscrite obtenue après avoir été scannée ou dessinée directement sur un document (type PDF).

Bien que d’usage courant, le droit monégasque n’appréhende pas, en soi, ce type de signature.

En effet, la signature manuscrite numérisée ne se confond pas avec la signature électronique au sens de l’article 1163-3, alinéa 3 du Code civil qui la définit comme « une signature qui consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification et garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache ».

A retenir

Bien que la signature numérisée ne puisse être assimilée à une signature électronique et ne bénéficie pas d’une présomption de fiabilité, cela ne signifie pas pour autant qu’elle soit dépourvue de toute valeur juridique.

En cas de contestation d’un écrit sur lequel figure une signature numérisée, il appartient au juge de se prononcer au regard de la double fonction de la signature (identification de son auteur et manifestation du consentement) sur la base des éléments produits aux débats pour prouver sa fiabilité.

Illustrations

Il est permis de se référer à la jurisprudence française en matière de signature manuscrite numérisée du fait de la proximité des dispositions du droit civil français et du droit civil monégasque relatives à la signature et à la preuve des obligations par écrit.

Dans un arrêt du 13 mars 2024 (C.cass, civile, Comm., n° 22-16.487, Inédit), la Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel de Versailles (ch. 13, 8 mars 2022, n° 21/01343) qui avait rejeté l’exécution d’une promesse unilatérale de vente de parts sociales sous seing privé en cas de défaillance dans le remboursement d’un prêt, conclue à distance, où figuraient des signatures scannées douteuses, dont il avait été soutenu qu’elles bénéficiaient d'une présomption de fiabilité.

La Cour de cassation a au préalable écarté le moyen de la méconnaissance de la liberté de la preuve commerciale qui autorise une preuve autre que littérale, au motif qu’« il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de la société H. que celle-ci ait soutenu que la preuve de la promesse litigieuse devait être appréciée au regard des règles énoncées à l'article L. 110-3 du code de commerce » (article 74 du Code de commerce monégasque).

Sur le terrain du droit civil, la Cour de cassation a estimé que la Cour d’appel avait retenu « à bon droit, que le procédé consistant à scanner des signatures, s'il est valable, ne peut être assimilé à celui utilisé pour la signature électronique qui bénéficie d’une présomption de fiabilité par application de l’article 1367, alinéa 2, du code civil » (article 1163-1, alinéas 3 et 4 du Code civil monégasque rédigés en termes identiques). Elle a considéré que les juges du fond avaient justement déduit des éléments produits aux débats (courriels, contrats, procès-verbal d’une assemblée générale) qu’ils ne permettaient pas de rapporter la preuve du consentement à l’apposition de la signature scannée, et que faute de pouvoir identifier avec certitude les auteurs des signatures scannées apposées sur la promesse litigieuse, la preuve du consentement à la cession de parts sociales en cas de défaillance dans le remboursement du prêt n’était pas rapportée.

En revanche, dans un arrêt du 14 décembre 2022 (CCass, Soc., 14 décembre 2022, n° 21-19.841, Publié au bulletin), la Chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la Cour d’Appel d’Angers (29 octobre 2020, n° 18/00521) qui avait donné effet à la signature numérisée apposée sur un contrat de travail à durée déterminée (CDD), rejetant la demande de requalification du CDD en contrat de travail à durée indéterminée (CDI) pour absence de signature.

La Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel avait à juste titre « énoncé que l'apposition d'une signature sous forme d'une image numérisée ne pouvait être assimilée à une signature électronique au sens de l'article 1367 du code civil ». Mais dès lors qu’il n’était « pas contesté que la signature en cause était celle du gérant de la société et permettait parfaitement d'identifier son auteur, lequel était habilité à signer un contrat de travail », la Cour d’appel en avait « exactement déduit que l'apposition de la signature manuscrite numérisée du gérant de la société ne valait pas absence de signature ».

* * *

Ces cas d’espèce mettent en exergue que la signature manuscrite numérisée peut, ou non, valoir signature au sens du Code civil, selon que son auteur peut, ou non, être identifié avec certitude et que la preuve du consentement aux obligations découlant de l’acte sur lequel elle a été apposée est, ou non, établie.

* * *

Autres publications